-Non non, je vais bien.

Enfin bien...une façon de dire à Omi qu'elle pouvait laisser tomber! Aller à l'infirmerie. Et puis quoi encore?! Si elle allait là-bas, elle ne s'empêcherait pas de saigner à blanc chaque personne qui osera l'approcher. Non, décidément, il ne valait mieux pas.

-Pas que pour ça, hein...

Elles étaient si différente qu'Omi ne comprendrait sûrement pas. Jamais, peut-être. Elle eut un faible sourire en entendant la phrase suivante.

-J'avais compris...

De toute façon, c'était comme si elle ne pouvait rien reprocher à Omi. Même si elle "l'insultait", la petite brune ne lui en tiendrait pas rigueur...bizarre, non?

Un baiser. Un simple baiser. Qu'est-ce qu'il lui prenait maintenant? Elle ne s'en rendait toujours pas compte, comme si l'information avait du mal à parvenir à son cerveau. Elle était loin d'être stupide, pourtant. Cependant Omi ne la repoussait pas, ne la retenait pas non plus d'ailleurs, mais le sang qui restait s'en occupait lui-même. Bientôt il n'y en eut plus dans sa bouche, et elle sembla reprendre ses esprits. Ouvrant de grands yeux elle brisa ce baiser forcé, et repoussa Omi comme si celle-ci l'avait frappée ou mordue. De petites rougeurs apparurent sur ses joues alors qu'elle évitait son regard, plus que gênée de ce qu'il venait de se passer. Elle n'était pas dans son état normal, là...impossible...

-Je...pardon...excuse-moi...

Elle bafouillait des excuses en jouant avec sa bague, signe d'une grande nervosité. Mais pourquoi diable avait-elle fait ça!

Elle voulait s'enfuir. Non, que le sol se dérobe sous ses pieds et l'entraîne loin sous terre. Jamais encore elle n'avait eu honte comme ça. Mais qu'est-ce qu'il lui avait pris?! Elle n'aurait jamais dû. Pourtant, elle avait un sacré self-control! Comment Omi avait-elle pu réussir à la pousser à bout ainsi? Elle était incroyable.

Non, Omi, pitié, ne me regarde pas...Naoto était sur le point de s'enfuir en courant, tellement elle avait honte d'elle-même. Comment allait réagir son roi, une fois que la surprise d'un tel acte sera passée ? Sûrement qu’elle allait la gifler, lui crier dessus ou quoi que ce soit encore. Elle n’avait pas à faire ça, l’embrasser ainsi…à moins qu’Omi ait compris que ce n’était que pour son sang ? C’était triste, mais mieux. Naoto ne voulait pas avouer ses faiblesses.

La louve lui posa la main sur la tête, alors que la vampire croyait qu'elle se ferait frapper. Omi ne lui en voulait pas? Vraiment? Elle avait plus peur de ça en fait, qu'Omi la rejette alors qu'elles venaient de se retrouver.

-Je suis désolée...

Elle la regarda dans les yeux avec l'air d'une petite enfant venant de faire une grosse bêtise. Une grosse bêtise, embrasser son amie...peut-être qu'elle exagérait un peu.

-Tu ne m'en veux pas...?

Elle fit une petite moue toute mignonne, ce qui contrastait vraiment avec son action précédente. Mais après tout...elle avait le droit d'avoir des réactions différentes à chaque fois...

Que de l'amitié? Maintenant Naoto en doutait. Elle se sentait honteuse, mais au fond d'elle quelque chose faisait qu'elle était triomphante. Triomphante de quoi? D'avoir osé embrasser Omi, son amie depuis un bon bout de temps? C'était parfaitement stupide. Et de toute façon, qu'est-ce qu'elle avait gagné, hein? Juste quelque chose de plus pour éloigner la louve d'elle. Bravo, Naoto, bien joué. Oh, elle se donnerait bien une ou deux paires de claque, là tout de suite.

-Maiiiiiiis-eeeeuh!

Réaction puérile, mais elle n'était plus à ça près. Elle pouvait se permettre d'agir de manière aussi enfantine avec Omi, de toute façon son roi ne lui en tiendrait pas rigueur. Et puis, elle avait aussi le droit de craquer de temps en temps! La petite brune se dégagea gentiment, et arrangea de deux coups de main ses cheveux lisses. C'était bien pratique ça, d'ailleurs. Même très emmêlés deux coups de brosse les démêlaient. Mais bref, elles n'étaient pas en train de parler cheveux, mais du baiser qu'elle lui avait donné. Donné...volé plutôt!

-Mais je...

Elle, trop s'excuser? C'était bien la première fois qu'on le lui disait. D'ailleurs, que lui arrivait-il, encore?! Elle parlait beaucoup trop! C'était une vraie gamine là, elle devait vraiment se reprendre. Et vite.

Des étoiles apparurent dans ses yeux, bien cachées pourtant par son masque neutre qu'elle avait remis en place. Omi riait...elle riait faiblement, comme d'habitude, mais que c'était mignon! Et elle lui promettait de ne pas lui en vouloir, elle était pas belle la vie? Bon, il y avait mieux bien sûr, si...non, elle ne devait plus y penser. Reprendre contenance malgré...ce petit baiser sur sa tempe...qui la fit rougir de nouveau...Stooop, elle devait arrêter!

-Je sais pas.

Naoto était redevenue elle-même, aussi froide et distante. Enfin, en apparence seulement! Car à l'intérieur, le sourire d'Omi continuait de la faire fondre doucement mais sûrement.

-Je boude pas.

C'était vrai, elle cachait juste petit à petit tout sentiment ou émotion qu'elle avait laissé paraître. Triste? Pas pour elle. Elle préférait rayer tout ce qui la reliait à l'humain dès maintenant. Elle avait peur qu'on découvre sa fragilité, peur qu'on en profite. Quoi de plus normal!

Omi était passée derrière elle, et Naoto retint un petit rire en la sentant l'enlacer. Elle allait finir par avoir le mal de mer si elle continuait! La jeune vampire posa ses mains sur celles d'Omi, et les agrippa doucement.

-Oh, ce serait pas gentil...

Il semblerait qu'Omi veuille jouer à l'enfant. Mais Naoto n'était pas sûre, elle était encore toute timide, trop préoccupée par ce qu'il pourrait lui arriver si elle se laissait aller. Mais que pourrait-il lui arriver avec Omi? Rien, non? Oui mais ça faisait des années qu'elle se cachait, difficile de la faire changer d'un seul coup. D'ailleurs la louve semblait l'avoir compris, vu qu'elle la laissait un peu.

-Ah oui...?

Pourquoi ça? Pourquoi ne pouvait-elle pas lui en vouloir? Elle était gentille, Omi. Elle l'appréciait un peu malgré leurs différences et son asociabilité légendaire. Elle ne la rejetait pas, ne la bougeait pas non plus pour la faire réagir. Et elle ne lui tenait pas rigueur de ses erreurs, même celle-ci.

Omi qui l'enlaçait encore. Elle n'avait vraiment pas l'habitude des câlins, et ne savait pas comment réagir...mais en soi, c'était plutôt agréable. Oui, ça l'était assez! Mais la phrase d'Omi la fit légèrement rougir.

-Non, je dois...peux...pas.

Elle ne devait pas, ce n'était qu'une automate. Elle ne pouvait pas rire, voyons! Et si quelqu'un les voyait? Un Tsuyoi? Les gens pouvaient se promener la nuit...et de toute façon, elle avait presque oublié comment rire. Pourtant Omi paraissait si enfantine, si mignonne...elle n'avait pas le droit de la décevoir et de faire sa rabat-joie! Qu'est-ce que cela lui coûterait de retomber dans l'enfance avec son amie? Rien du tout, elles n'étaient que toutes les deux! Alors elle lui fit un faible sourire.

-Fais-moi rire alors...

Naoto était toujours aussi effrayée à l’idée de se découvrir, d’ouvrir une petite porte dans sa carapace épaisse comme un mur blindé de sept mètres d’épaisseur. Elle ne voulait pas qu’on la voit. Sa sensibilité et sa fragilité pourrait causer sa perte, elle devait se battre contre ça ! Mais était-ce vraiment nécessaire de se cacher éternellement ? Ou n’était-ce pas plutôt une mesure qu’elle avait prise toute seule et qui était un peu trop…radicale ? Jusqu’à maintenant, ça lui avait évité de souffrir. Mais désormais ce n’était plus le cas, au contraire…cependant, essayez donc de changer une habitude vieille de plusieurs années. Difficile, n’est-ce pas ?

-Mais je boude paaas…

Elle ne pouvait pas bouder son amie. De un parce que c’était Omi, et de deux parce qu’elle n’était pas d’humeur à bouder. En fait, cela faisait des années qu’elle n’avait pas été d’aussi bonne humeur…même si cette histoire de baiser la déprimait un peu.

-Oh…pour rien…

Elle ne lui en voulait pas, point. Naoto devait se mettre ça dans le crâne, Omi avait bien compris ce qu’elle avait cherché à lui faire croire. C’était à moitié vrai, bien sûr, mais elle n’allait pas la contredire ; mieux valait qu’elle continue de croire que la petite vampire n’avait qu’un sentiment d’amitié à son égard.

S’amuser. Un mot qui n’avait presque plus aucun sens pour elle. Oh, pour sûr, elle jouait avec la vie de ses victimes, mais c’était plus de la cruauté ou de la nécessité que de l’amusement. Elle ne s’était plus amusée depuis l’enfance, et même enfant déjà elle évitait. On naît asociale, on ne le devient pas. Naoto ne savait plus quoi faire, si elle pouvait se laisser aller, si elle devait au contraire refuser la tentation et s’en aller, s’enfuir encore. Fuir…elle détestait fuir. Parfois, même lorsque c’était nécessaire, elle ne fuyait pas. Mais là ? Non. Elle allait rester, et tenter de faire comme Omi : retomber en enfance. Bien sûr, elle aura besoin d’aide. D’ailleurs, elle venait d’en demander à Omi, et cela semblait lui avoir donné une idée. La petite brune avait un peu peur au fond ; qu’allait donc inventer Omi pour réussir à la faire rire ? Elle lui avait pourtant donné une mission impossible, là.

Hein, quoi, s’accrocher ? Mais où ? Pourquoi ? Tant de question que Naoto ne posait pas, et ne poserait pas. Elle vit Omi bouger, puis la faire bouger, et sentit d’un coup ses pieds quitter le sol. Omi la portait ! Elle s’agrippa instinctivement à sa nuque, peu habituée à une telle hauteur. Mais Omi ne se contenta pas de ça ; elle la faisait tourner, maintenant !

-Aaaah Omi, je vais tombeeeeer !

Elle laissa échapper un bref rire tout mignon mais rougit juste après, comme si elle avait honte de s’être laissé aller ainsi. En tout cas, un petit sourire ne quittait pas ses lèvres, pour une fois elle était heureuse. Jeune et insouciante. Comme lorsqu’elle vivait encore avec ses parents, une enfant parfaitement normale, et non la vampire asociale sans sentiment qu’elle s’efforçait d’être.

Naoto commençait à s’amuser. Si seulement Omi n’avait pas toutes ces responsabilités ! Elles auraient pu s’amuser ensemble comme des gamines, comme elle le faisait maintenant d’ailleurs. Mais en même temps…est-ce qu’un autre roi se serait donné la peine de rester avec elle après les avoir libérés ? Même plus : est-ce qu’un autre roi se serait déplacé pour eux ? Peut-être, puisque cela concernait la guerre. Mais ils n’auraient été que des pions dans un jeu sans fin. Pas des êtres humains comme Omi les considérait tous. C’était peut-être mieux ainsi.

Elle n’arrivait pas à y croire. C’était elle qui avait ri ? Elle, l’automate sans sentiments ? Elle avait réussi…Omi avait réussi à la rendre un peu plus humaine en quelques minutes, détruisant une partie de ce qu’elle avait mis des années à construire ! Mais Naoto avait un peu peur là-haut, la différence de taille sûrement.

-Si, je vais tombeeeer !

Elle s’agrippait de toutes ses forces, retombant en enfance. Cependant sa louve préférée semblait avoir le tournis, Naoto aussi d’ailleurs ! Elle rit légèrement en la sentant vaciller, mais s’inquiéta un peu de l’impact avec le mur. Non ? Omi ne s’était pas fait mal ? Tant mieux ! Mais elle ne la lâchait pas, c’était si étrange de se retrouver plus grande qu’elle pour une fois !

Une honte d’avoir des sentiments ? Oui, toujours…mais plus avec Omi ! Maintenant elle le savait, son amie pouvait la voir comme elle était réellement, mais seulement lorsqu’elles étaient deux. Ah, mais elle n’avait pas répondu à sa question…alors elle lui tira la langue en guise de réponse ! Oui, c’était encore un geste puéril, mais elle avait envie de se comporter comme une gamine. Vu qu’Omi faisait de même, il n’y avait pas de problèmes !

Un petit baiser sur sa mâchoire, et les joues de Naoto se mirent encore à rougir. Elle sourit un peu, baissant la tête pour regarder la louve. Elle souriait encore…c’était trop mignon ! D’habitude Naoto n’aimait pas particulièrement les trucs mignons, mais pour le coup…elle adorait !

Omi la reposa enfin et elle vacilla légèrement. Ça faisait bizarre de se retrouver à sa taille habituelle, presque une tête en dessous de son amie ! Omi semblait heureuse, et Naoto l’était aussi. Elles avaient besoin de ce petit moment de complicité, un moment très rare, du moins pour la vampire. En fait, c’était même la première fois. Peut-être aussi pour Omi, mais bon…il n’y avait pas de preuve !

-Si…

Si, ça lui faisait beaucoup de bien. Elle n’avait plus rit depuis des années, et il fallait avouer qu’elle trouvait toujours ça aussi étrange. Le bonheur…elle y avait goûté ce soir-là, avec Omi en plus ! Que rêver de plus ?

Humaine. Humaine et heureuse. Naoto ne s’était jamais sentie aussi vivante qu’en cet instant, simplement en se lâchant et en retombant en enfance. Qui aurait cru qu’elle puisse un jour retrouver des sentiments, des sensations, et mieux encore : les partager avec quelqu’un ? Parce qu’elle était toujours humaine, au fond d’elle. Ce n’était pas qu’une buveuse de sang sans âme et sans cœur. Elle était sensible, trop sensible peut-être, et les deux opposés s’attirent. Ses parents n’étant plus là pour la protéger du monde extérieur, elle avait trouvé une autre solution. Sa carapace. La découverte de son état de vampire n’avait fait que renforcer cette barrière qu’elle avait forgée, et peut-être était-ce mieux ainsi. Bien qu’elle ait aussi besoin de décompresser, de s’amuser… chose qui lui avait toujours manqué. Elle savait faire avec, à la longue, mais il fallait avouer que cette retombée en enfance lui avait fait le plus grand bien. Et le meilleur ! Elle l’avait effectuée avec sa très chère Omi…

-Oui, mais…je ne te croyais pas.

C’était normal en même temps, et Omi devait très bien le comprendre. Naoto avait besoin de temps et d’aide pour redevenir « normale », pour briser ce mur qui l’avait toujours séparée des autres. Mais une demande voulait sortir de ses lèvres. Une simple demande…allez, elle pouvait…

Non, elle ne pouvait pas. Elle le voulait, mais ne pouvait pas lui demander. Elle aurait voulu recommencer, revoir Omi le lendemain et s’amuser avec comme deux enfants…mais la louve avait trop de responsabilités, et sûrement que ça l’ennuierait plus qu’autre chose. Non, vraiment, autant la laisser tranquille.

Une petite moue sur le visage. Une moue enfantine, comme une gamine qui demandait à sa sœur de jouer avec elle. Pour le coup, Naoto avait une totale confiance en Omi. Elle savait qu’elle au moins ne jouerait pas avec son cœur…du moins pas consciemment. Mais la phrase d’Omi lui fit baisser les yeux. Elle le savait…

-Oui, mais…

Mais quoi ? Mais elle ne pouvait pas. Il fallait la changer dès le début, depuis que ses parents étaient morts. Ca faisait beaucoup d’années à rattraper, tout ça…Omi était-elle prête à relever le défi, ou allait-elle la laisser dans son coin ? Sûrement la deuxième hypothèse. Elle avait d’autres obligations bien plus importantes que de s’occuper d’une vampire qui ne voulait même pas être changée. Elle soupira légèrement, un peu triste.

Naoto la voyait faire. Elle la sentait s’approcher d’elle, de plus en plus. Qu’allait-elle faire ? La vampire le savait sans le savoir. Elle le sentait. De douces lèvres se posèrent sur les siennes, alors qu’elle fermait les yeux. Elle nageait en plein rêve. Est-ce que cela arrivait vraiment ? Ou n’était-ce qu’un tour de la part de son esprit ? Un unique baiser. Il ne dura pas très longtemps, mais le temps s’était arrêté. Elle profitait de ce moment soudain, inattendu, comme quelque chose qui n’allait jamais se reproduire. Mais ce fut court, si court…et si long en même temps…quand Omi se redressa, Naoto rouvrit les yeux et la regarda avec tendresse. Ses yeux ne pouvait déjà plus se détacher de son visage angélique, elle n’arrivait pas à croire à ce qu’il s’était passé.

-Quittes…

Pour Omi, ça n’avait été qu’un jeu. Une sorte de jeu ; Naoto l’avait embrassé, alors elle l’embrassait à son tour. Rien d’autre. La jeune vampire eut un faible sourire, un sourire un peu triste cependant. Mais elle s’y attendait…de toute façon, que demander de plus ? Elles étaient amies. Juste…amies.

Naoto regarda autour d’elles, persuadée que quelqu’un pouvait les voir. Il y avait sans doute des insomniaques, ici. Bon d’accord, peu, et peut-être pas forcément à les observer, mais toute de même. Elle avait besoin d’être rassurée. Et si Omi jouait un double jeu ? Si elle n’avait qu’une envie de s’amuser, de jouer avec sa sensibilité ? Non, bien sûr que non. C’était bien mal connaître son amie, la crème des crèmes. Sa peur habituelle des gens lui dictait vraiment n’importe quoi, et cela ne pouvait pas continuer. Elle devait se calmer, et essayer de réfléchir.

Se lâcher…se lâcher et tout oublier…il n’y avait qu’avec l’alcool que Naoto y parvenait. Et encore. Souvent, elle buvait seule chez elle, jusqu’à tomber ivre morte sur son lit ou à même le sol, à en oublier jusqu’à son propre prénom. Ce n’était pas parce qu’elle ne voulait pas, oh non. C’était simplement par habitude. Se cacher de tous, c’était ce qu’elle faisait depuis très longtemps. Des années. Et Omi voulait la changer d’un seul coup ? Erreur…ça ne marcherait sans doute pas. Jamais. Pour cela, il faudrait qu’Omi soit avec elle 24h/24, quelque chose d’impossible et impensable pour le roi des Yowais.

Elle était encore sous le choc. Omi l’avait embrassée ! C’était même pas croyable ! Elle s’en sentait toute retournée, comme flottant au-dessus des nuages. Il avait été parfait, ce baiser. Un peu court, mais parfait. Des lèvres parfaites sur les siennes mutilées. Si seulement Omi pouvait le voir…si seulement elle n’était pas aussi aveugle et comprenait ses sentiments…mais malheureusement Naoto pouvait toujours rêver. Elle ne verrait rien, et c’était peut-être mieux ainsi. Oui, ça l’était. Elle ne voulait pas la perdre…

-Hmm ?

Ouh là, elle partait loin là. Dans ses pensées en fait. Elle secoua légèrement la tête pour reprendre ses esprits, mais n’eut pas le temps de se « réveiller » qu’Omi l’avait prise par surprise et attirée à elle. Elle eut un léger cri de surprise, mais se laissa faire ; cette proximité soudaine n’était pas à refuser. Elle sourit davantage, et passa timidement ses bras autour de son amie. Mais elle grommela quand Omi lui parla.

-Pff suis pas baka d’abord…

Elle fit semblant de bouder mais eut un petit sourire. Elle se sentait mieux, comme…libérée d’un poids qui au fond n’existait pas. Elle n’était plus un simple robot qui ne se contentait que de survivre, elle vivait de nouveau. Enfin…elle vivait pour l’instant ; demain, tout redeviendra comme avant, elle en était persuadée. C’était un peu triste, quand on y songeait.

A l’ouest elle était, et elle ne pouvait pas en revenir. Omi joua encore un peu avec elle, mais elle bâilla soudainement et rougit. Ce n’était pas par ennui, mais elle devait être bien crevée…d’ailleurs, quelle heure était-il ? Sûrement tard déjà ! Ah en effet…les rayons du soleil pointaient le bout de leur nez, ce qui signifiait que la « récréation » était terminée. Dommage…

-Uh…

Il commençait déjà de faire chaud, malgré la petite brise fraîche qui venait les taquiner. Elles s’amusaient bien pourtant ! Saloperie de soleil. Elle lui ficherait bien un coup de poing si elle le pouvait, pour le renvoyer plus loin au moins quelques heures de plus. Rêve de petite fille…elle ne pouvait rien contre le temps, malheureusement. Un peu effrayée par cette boule de feu qui menaçait de venir la brûler, elle dut se faire violence pour ne pas se cacher derrière Omi.

-Oui…

Elles devaient s’en aller, maintenant. Naoto devait aller se coucher, et Omi travailler. Quelle plaie…bon, au moins elles se seront bien amusées. La vampire accepta volontiers la main de son amie, et la suivit à l’intérieur du château, du côté des Yowais. Omi la guida jusqu’à sa chambre, alors que les yeux de Naoto lui piquaient un peu, signe que la fatigue commençait à la gagner. Elles s’arrêtèrent devant la porte de sa chambre, qu’elle ouvrit d’une main. Mais elle bouda un peu en entendant Omi lui dire d’aller se coucher.

-Mais je suis pas fatiguééée !

Elle avait dit ça en bâillant, ce qui démentait automatiquement ses paroles. Dommage pour elle…mais de toute façon, avec le soleil qui se levait, elle n’avait guère d’autre choix que de s’enfermer dans sa propre chambre en attendant la tombée de la nuit prochaine. C’était chiant d’être un vampire, quand on y pensait.

Naoto se sentait vraiment comme une petite fille avec sa grande sœur. D’ailleurs, elle fut étrangement toute contente de sentir les douces lèvres d’Omi sur sa peau, Omi qui se comportait vraiment comme quelqu’un de sa famille. Il leur manquait ça à toutes les deux : une vraie famille. Mais peut-être que si elles avaient vécu autrement, elles ne seraient pas elles-mêmes. Oh, elles auraient fini ici quoiqu’il advienne, puisqu’elles étaient nées avec leurs démons respectifs, mais peut-être qu’Omi ne serait pas roi, peut-être que Naoto serait plus naturelle, peut-être que ce château serait toujours aux mains des Tsuyois. De toute façon, le passé était le passé, il ne fallait pas s’arrêter dessus et vivre le présent au maximum.

-Travaille bien, Omi.

Elle lui fit un petit sourire innocent alors que la louve lui frottait le crâne une fois de plus. La main s’égara un peu plus bas, mais disparut, et Naoto leva la tête vers son amie. Ce sourire…elle allait faire de beaux rêves pour une fois, avec ce sourire. Il était si beau, si mignon…mais elle ne devait plus penser à ça. Du moins…pas en présence d’Omi.

-Une enfant…

Omi avait sans doute raison. Au fond, Naoto n’était encore qu’une grande gamine, qui n’avait plus ses repères et devait se cacher pour vivre. C’était triste…Omi se retourna après lui avoir souhaité bonne nuit (enfin, bonne journée puisque la nuit des vampires commençait là où s’arrêtait celle des autres) et disparut dans le couloir sans se retourner. La petite brune la regarda s’éloigner un court instant, soupira et ferma la porte. Elle marcha telle une zombie vers son lit, se laissa tomber dessus comme une grosse loque et, sans même avoir pris le temps de se déshabiller, s’endormit aussitôt alors qu’un faible rayon de soleil osait traverser les épais rideaux noirs.

FIN